Bonjour à tous,
Le week-end du 11 novembre a eu lieu le premier tournoi de karuta E-kyu français, sponsorisé par l’AJKA (All Japan Karuta Association). à cette occasion, nous avons eu 26 participants parmi lesquels quatre ont pu obtenir leur premier dan et passer D-kyu.
Pour l’occasion, nous avons loué le gymnase Elisabeth, pour trois jours. Le planning du week-end était donc le suivant :
- Vendredi 11 : entraînement
- Samedi 12 : tournoi
- Dimanche 13 : entraînement
C’est la première fois qu’un tournoi de la sorte est organisé en France, et nous accueillons des personnes qui font le déplacement depuis cinq pays différents, ainsi que Yokoya-san et Miyoshi-san qui viennent du Japon pour nous aider.
Pour nous, le week-end ne commence pas le vendredi mais plutôt le jeudi matin où, avec Amandine, nous allons chercher Yokoya-san et Miyoshi-san à l’aéroport. Comme elles repartent au Japon le lundi, le jeudi sera leur seule journée de tourisme. Comme Amandine et moi n’avons pas d’obligation dont nous ne pouvons nous libérer, nous décidons de leur faire visiter Paris.
Tout se passe très bien, mais on rentre déjà un peu fatigués avant même que le week-end ne commence.
Le vendredi matin, on se retrouve à 9 h au gymnase Elisabeth et on commence à installer le carré de tatamis, ça a vraiment l’air prometteur.
Pour le premier match, on fait lire Yokoya-san qui, même si elle n’a pas lu depuis longtemps, est quand même lectrice A-kyu. Je joue contre Miyoshi-san, contre qui j’ai toujours fait des matchs serrés au Japon.
J’ai du mal à rentrer dans mon match, et le comportement de tout le monde n’est pas forcément exemplaire : les joueurs mettent beaucoup de temps à replacer leurs cartes, ça traîne et le match s’éternise vraiment. De plus, dans mon match, je prends une avance de presque dix cartes (je gagne 4 – 13) mais je n’arrive pas à le finir, Miyoshi-san ne fait que défendre. D’un coup, sur ces tatamis de judo, avec cette petite voix qui vient de loin et que j’ai du mal à entendre, je me retrouve dans l’ambiance d’un tournoi au Japon, je me rappelle ce match décisif où je me suis fait remonter et où j’ai perdu d’une carte contre quelqu’un qui n’avait fait que défendre.
Finalement, je gagne de quatre cartes, mais ça n’a pas du tout été une partie de plaisir. Je discute un peu avec Miyoshi-san à la fin du match qui n’a pas forcément que des commentaires gentils et qui me dit qu’elle aime bien les matchs où l’on parle moins et se concentre plus. Je peux comprendre, puisque tout le monde parlait, mais j’étais content de rejouer contre elle pour la première fois depuis plusieurs mois. Je ne comprends pas pourquoi elle a réservé ce commentaire pour la fin du match, quand elle aurait pu m’en parler pendant. On commence à débriefer le match, mais Yokoya-san arrive et me dit qu’il faut que je décide des matchs suivants, décidément, je sens que ce week-end, on ne va pas me laisser tranquille.
Pour avoir un peu plus de liberté et essayer de faire en sorte que tout se déroule un peu mieux, je ne joue pas le deuxième match. Amandine nous fait profiter de sa voix de lectrice B-kyu et, avec une personne pour regarder et gérer les matchs, tout se passe de manière beaucoup plus apaisée.
À la fin du deuxième match, il est presque 13 h et là se pose une question : est-ce qu’on va réussir à faire cinq matchs dans la journée ? Ça parait difficile, mais si on ne fait que quatre matchs, on finira vraiment tôt et je pense que ça aura un goût de trop peu pour tout le monde.
Du coup, on met les gaz, et on enchaîne les matchs, les joueurs se comportent de mieux en mieux, replacent leurs cartes de plus en plus vite, et avec pour les trois derniers matchs la lecture de Miyoshi-san, Naoki-san et la mienne, on termine cette première journée avec cinq matchs où tout le monde a pu entendre cinq lectures à voix haute de cinq personnes différentes.
En rentrant de cette première journée, il faut faire les préparatifs du tournoi, c’est-à-dire, rentrer avec un peu plus d’une dizaine de jeux sur le dos et tout trier pour les matchs du lendemain.
Réveil à 7 h pour être au gymnase à 8 h, je n’ose imaginer à quelle heure Quentin et Amandine ont dû se lever et comment Amandine survit encore après ces deux journées.
Les favoris de la journée sont, pour les étrangers, Tomomi, qui a perdu tous ses matchs mais à chaque fois de quelques cartes seulement alors qu’elle a joué contre tous les gens les plus forts ou presque ; Sara qui vient d’Italie et qui est clairement l’une des meilleures joueuses venues de l’étranger et Timo, venu d’Allemagne, qui se débrouille bien. Du côté du club de Paris, il y a clairement quatre joueurs qui sortent du lot : Alice, Thomas, Ava et Aude.
Le matin du tournoi, c’est un peu l’hécatombe, une personne doit annuler parce qu’elle a manqué son train de Londres, une autre est venu d’Allemagne, mais est tombé malade en arrivant en France. Malgré tout ça, on arrive à être 26 et à constituer quatre poules. Trois poules de six et une poule de huit. À l’issue de trois matchs dans ces poules, deux joueurs sortiront vainqueurs, et les huit survivants s’affronteront l’après-midi dans un match à élimination directe où seuls les quatre victorieux obtiendront leur premier dan.
On a la poule 1, surnommée « la poule de la mort » comprenant des joueurs forts tels que Ava, Timo, Sara et Ester que je n’ai pas mentionnée tout à l’heure mais qui vient de Hongrie et qui s’en sort très bien. Ava va sortir première de cette poule avec trois victoires, dix cartes contre Martin, une carte contre Timo et trois cartes contre Sara. Malheureusement, Sara et Timo ne se sont pas affrontés dans la poule et Sara perd au comptage des points face à Timo qui avait joué contre deux adversaires moins forts et avait donc eu des victoires avec un grand écart de cartes. Cependant, dans les tournois, la chance compte tout autant.
Dans la poule 2, on a Alice et Tomomi, qui sortent toutes deux de la poule sans surprise, mais Alice perd son match contre Tomomi, juste après s’être blessée.
Dans la poule 3, Quentin C. qui a découvert le karuta à la Japan Expo surprend tout le monde en sortant de son groupe avec trois victoires, tandis qu’Antoine de Brest crée aussi la surprise en battant Aude et en sortant deuxième de son groupe.
Dans la poule 4, Thomas et Matteo sont loin devant les autres et sortent sans surprise de leur poule.
Pour les phases finales, je voulais donner un avantage aux personnes étant sorties premières de leur poule, et donc faire que les premiers de poules (Ava, Tomomi, Quentin C. et Thomas) ne puissent pas s’affronter entre eux. Cependant, les têtes de série sont interdites au karuta et, pour que le tournoi soit officiel, nous avons été obligés de composer les quarts de finale de manière aléatoire. On s’est donc retrouvés avec :
Ava – Tomomi
Alice – Antoine
Thomas – Timo
Matteo – Quentin C.
Ava contre Tomomi est vraiment pour moi le match de l’injustice car les deux méritaient clairement leur premier dan, mais une seule pouvait l’obtenir. Finalement, Ava, fatiguée de ses trois matchs compliqués pendant les poules, n’arrivera pas à faire la différence, et Tomomi l’emporte de dix cartes.
Alice contre Antoine : malgré ses bonnes performances en poule, Alice est un cran au-dessus et l’emporte de onze.
Les deux matchs restants sont plus serrés. On a Thomas contre Timo : je pense que Thomas est globalement un peu meilleur, mais la pression du tournoi joue contre lui, le match est très serré et Thomas se fait peur en remportant son premier dan de seulement deux cartes.
Pour le dernier match, on a Matteo contre Quentin C. Matteo a de l’expérience, mais dans les jours précédents, il ne nous a pas montré un karuta exceptionnel. Quentin C. est sur une série de trois victoires en poule mais a commencé le karuta il y a seulement quelques mois, il se bat de toutes ses forces mais l’expérience finit par l’emporter et Matteo gagne de trois.
Ensuite viennent les demi-finales (dont vous pouvez d’ailleurs retrouver les vidéos sur notre chaîne Youtube).
Thomas perd de sept contre Tomomi et Alice l’emporte de six contre Matteo.
Ensuite, pour la finale Alice contre Tomomi, les deux jouent leur sixième match et sont très fatiguées, mais Alice enchaîne les doubles fautes tandis que Tomomi conserve son calme, profite des erreurs de son adversaire et l’emporte de neuf cartes.
Le tournoi touche à sa fin. Pendant la cérémonie de fin, Yokoya-san fait des compliments aux joueurs sur leur comportement qui a été, il faut bien l’admettre, exemplaire : très peu de contestations, des bonnes manières, je dois dire que j’étais vraiment fier de tous nos joueurs.
Avec ce tournoi, on a vraiment réussi à ramener un petit bout du Japon en France. Je pense que tous les joueurs qui ont eu une première expérience avec ce tournoi ont ressenti quelque chose de très similaire à ce qu’ils auraient vécu s’ils avaient eu une première expérience au Japon. Et tout cela, il faut bien l’avouer, ça fait quand même chaud au cœur !
Après ces deux journées je suis épuisé, et Amandine prend le relai pour gérer, elle amène tout le groupe (plus de trente personnes) dans un restaurant avec une heure de queue et arrive à nous faire passer devant tout le monde, franchement c’était un petit miracle !
La soirée se passe bien et le lendemain, à 9 h 30, nous sommes de retour pour une petite journée d’entraînement.
Je commence par jouer contre la gagnante de la veille (qui nous a quand même un peu volé la coupe, on ne va pas se le cacher) même si elle n’a pas eu un parcours simple et qu’elle mérite amplement sa victoire.
Elle fait un début de partie plutôt solide, mais n’arrive pas bien à tenir la pression du match, je prends rapidement l’avantage. J’ai un peu de mal à prendre les 2-3 dernières cartes mais je gagne quand même de douze. Je profite du temps qui reste avant la fin du match pour lui donner un maximum de conseils pour progresser (il ne faudrait pas que la personne qui a gagné notre tournoi se fasse éclater en tournoi D-kyu une fois de retour au Japon !).
Le match d’après, je joue contre Mayuko, une A-kyu cinquième dan qui est passée nous aider pour le tournoi. Le match est vraiment cool, mais comme tous les bons A-kyu, en fin de match, elle arrive à prendre les cartes qu’elle vise et je me retrouve en retard de cinq cartes. Je passe à la défensive, elle n’arrive plus à prendre mes cartes, mais sa dernière carte est lue et je perds de trois. Il n’y a pas à dire, ça fait vraiment plaisir de pouvoir jouer des matchs de ce niveau en France !
Le reste de la journée, je lirai deux fois et je surveillerai le dantaisen (match en équipe) improvisé dont Miyoshi assurera la lecture.
À part un petit cafouillage sur le tri des cartes du 4ème match, le reste du week-end se déroule sans accro, la soirée se termine dans une crêperie de Montparnasse et tout est bien qui finit bien.
Je vous laisse quelques photos du tournoi, et aussi les résultats des matchs du week-end pour la postérité !
Je ne sais pas quand est-ce qu’on pourra organiser à nouveau ce genre d’événement, mais j’espère sincèrement voir les tournois européens se multiplier et voir de plus en plus de personnes passer des dans en dehors du Japon.
Si vous avez lu jusqu’ici, merci à vous, et comme je ne sais pas quand je reprendrai la plume pour Karuta France je vous souhaite à tous de bonnes fêtes de fin d’année.
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