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Gagner contre une A kyu et perdre contre une D kyu.

04/03/2022 – Gabriel


Comme le dit le titre de l’article cette semaine j’ai gagné contre une A kyu et perdu contre une D kyu. Alors c’est sûr, ça fait plaisir de gagner contre une A kyu et évidement ça ne fait pas plaisir de perdre contre quelqu’un qui est dans la division en dessous, d’autant plus que j’ai perdu ce match de 15 cartes. Mais ce que je trouve intéressants ce sont les leçons qu’on peut tirer de ces deux matchs et de ces deux résultats qui ne sont pas « banales ».


Je commence donc par le premier match que je joue contre Soyama-san. Ces derniers temps elle n’a pas pu tant s’entrainer que cela entre son travail et le covid, mais ça reste une A kyu avec un très bon niveau. Même quand elle était C kyu, je n’ai jamais réussi à lui prendre une partie, et j’ai facilement perdu une dizaine de match contre elle de plus de 10 cartes à chaque fois depuis que je suis au Japon.


C’est Wake-san à la lecture sur le Ariake, il y a la climatisation et ils ont mis le son très faible. Au début, « yamaga » est lu et elle a les deux « yama » et j’arrive avec un tout petit peu de retard. Puis elle me prend « aria » chez moi alors que j’ai les deux « ari ». Déjà, c’est un petit coup dur au début du match, après cela j’arrive à prendre « imako » chez elle alors que « imawa » est chez moi. Cependant juste après cela « hanasa » est lu et je ne visais pas particulièrement « hanano », mais je fais un balayage hyper rapide dessus qui fait voler qu’une seule carte sur sa ligne en haut à gauche. Si ce n’avait pas été une faute, ça aurait été une prise parfaite. Après cela, elle prend « chigirio » sur « chigiriki » ce qui me sauve un peu et me remets dans le match. Cependant très peu après ça je fais une faute un peu pourrie en touchant les cartes à coté de « haruno » sur « harusu » alors que la syllabe déterminante avait clairement déjà été prononcée. Après ça, le match devient un peu plus serré et, même si Soyama-san est plus rapide que moi, elle fait aussi quelques fautes et je protège bien quelques cartes avant la syllabe déterminante. Par exemple il ne restait que « mikaki » en carte en mi sur le terrain et je l’ai protégé dès la première syllabe, dans ces conditions, peu importe à quel point l’adversaire a un bon timing, si on peut l’empêcher de passer, on peut se garantir quelques prises « faciles ».


A la fin du match, c’est très serré et on arrive à 6-6, puis 4-4 et je finis par mener 1 à 2. Je vise ma carte et la carte de droite de l’adversaire. A ce moment-là Soyama-san fait un otetsuki sur « wagai », il n’y avait plus de « wa » sur le terrain mais c’était la dernière « wa » morte et on avait eu 3 « wa » pendant longtemps donc ce n’est pas une faute complétement incompréhensible, mais ça reste très lucky de ma part. Je peux donc envoyer ma dernière carte sur cette faute et je gagne le match de 3. Cependant « oku », la dernière carte qui était chez moi sera la seule carte qui ne sera jamais lu, j’ai donc eu d’autant plus de la chance qu’elle fasse cette faute, car ce n’est pas dit que j’aurais pu lui prendre une de ses 2 cartes.


Au moment où elle a fait cet otetsuki qui m’a fait gagner le match, j’étais vraiment en position offensive et je me demande à quel point le fait que j’attaque la carte sur laquelle elle a fait la faute a pu jouer. Est-ce que si je n’avais pas du tout bougé, elle aurait quand même commis une faute. Ce n’est pas sûr. On a toujours tendance à faire plus de fautes contre un adversaire qui nous met la pression. C’est pour cela que quand on est contre quelqu’un de plus rapide il ne faut vraiment se laisser entrainer dans un combat de vitesse perdu d’avance. S’il y a à peu près le même nombre de faute des deux côtés, c’est l’adversaire le plus rapide qui gagnera. Alors que au contraire, si on est capable de continuer à jouer son propre Karuta, de ramasser les cartes où l’adversaire est un peu moins rapide, d’avoir quelques bonnes prises, de protéger quelques cartes stratégiques, de prendre les cartes séparer et de laisser son adversaire faire une ou deux fautes tout seul, c’est tout à fait possible de gagner contre un adversaire plus rapide.


Je pense que si j’ai pu gagner ce match, c’est vraiment parce que je n’ai pas paniqué et que je suis resté calme. Soyama-san est bien plus rapide que moi, mais le karuta est vraiment un jeu où l’on peut utiliser pleins de stratégies différentes et il n’est vraiment pas dit que l’on perde contre un adversaire plus rapide. Ce n’est pas comme si c’était possible d’être hyper rapide sur toutes les cartes et, si on arrive à faire les bons envoies et les bons déplacements, il est tout à fait possible d’induire quelques fautes chez son adversaire. De plus, même si un adversaire à un meilleur timing que nous sur les cartes à 3 syllabes c’est aussi possible d’en protéger certaines de temps en temps pour que le timing n’a plus d’importance. Il est également possible de séparer ses cartes pour augmenter ses chances d’en avoir au moins une des deux. Enfin, au Karuta, une bonne vitesse sans fautes n’est pas possible sans une mémorisation très solide. Ainsi, si l’on fait les bons envoies et les bons déplacements et qu’on rend la partie difficile pour l’adversaire, c’est tout à fait possible de le couper dans son élan. Bref, être rapide au Karuta c’est loin de tout décider et c’est aussi ce qui rend ce jeu si intéressant. Il existe vraiment beaucoup de stratégies différentes qu’il est possible de mettre en place, et tout le monde peut donc se trouver des points forts.


Je pense qu’il y a un autre point important dans ce match. Wake-san était le lecteur sur le Ariake, pendant les trois quarts du match avant que quelqu’un demande à monter le son, le volume était très faible et en plus de ça, il y avait le bruit de l’aération en fond. Si on résume, pas forcément les conditions idéales pour jouer au Karuta. Depuis presque toujours, jouer au karuta dans ce genre de conditions pas terrible m’a toujours un peu tapé sur le système. Le problème c’est que si l’on n’est pas calme et dans un bon état d’esprit, il devient vite très difficile de prendre les cartes. Il n’est pas rare qu’en tournois, surtout en D kyu et en C kyu et encore plus dans les premiers rounds, d’être assis à une place loin du lecteur où sa voix très faible peut être accompagné de bruits parasites. Je pense que dans ce genre de situation, plutôt que de se laisser atteindre par cela, il faut essayer de se dire que c’est une chance. C’est une chance, parce qu’il est très probable que notre adversaire n’arrive pas complétement à faire fi de cela, et donc, si on arrive à être nous-même concentré malgré ces conditions, on prend déjà un avantage conséquent sur l’adversaire. Cela peut paraitre bête, mais le mental est hyper important au Karuta et d’ailleurs, l’ancien Meijin Kumehara-san citait le mental quand il parlait des cinq qualités essentielles d’un joueur de karuta.


Ce jour-là à Suginami, j’ai lu au deuxième match et j’ai gagné mon 3ème et mon 4ème match contre deux C kyu, en sommes je n’aurais pas pu mieux commencer le mois de mars. Je jouais le troisième match contre une C kyu contre qui je gagne presque à chaque fois et je l’emporte de 13. Cependant le dernier match était bien plus compliqué. J’étais contre une C kyu qui est meilleur que moi, pourtant j’arrive à gagner de 6. Un peu comme dans le match contre Soyama-san, j’ai su rester calme malgré la vitesse de l’adversaire et ça a payé comme souvent. Au karuta les cartes sont lu dans un ordre aléatoire et cela induit une part de chance et fait que bien souvent le flow du match passe d’un joueur à l’autre. S’il l’on perds le match tout seul bêtement quand le flow n’est pas en notre faveur, il est impossible de remonter par la suite, alors que si on est capable d’attendre patiemment notre moment sans faire de faute, c’est le plus souvent récompensé.


Le 2 mars j’ai un entrainement à Keio, où je gagne de 19 contre un joueur sans dan puis de 14 contre une D kyu avant de perdre contre 2 B kyu de une et 13 cartes. Le match où je perds de 1 carte, j’étais mener de 8 (20-12) à un moment malgré le fait que je n’ai fait qu’une faute dans tout le match et rien ne se passait comme je voulais, mais j’ai su rester calme et remonter. C’est certes une défaite mais j’étais content de mon match et c’est le plus important. Le match où j’ai perdu de 13, j’ai fait 6 fautes, j’ai loupé des cartes faciles, je me suis laissé déconcentré par pleins de choses, le parfait exemple de ce qu’il ne faut pas faire dans un match.


Le 3 mars on arrive à l’entrainement qui nous intéresse. Je gagne le premier match contre une B kyu de 2 cartes, mais il n’y a pas tant de choses à raconter. J’ai fait une seule faute sur « wasura/wasure », j’ai fait un bon modorite sur « asaborakea » chez moi alors que j’étais en-train de protéger « asaborakeu » chez elle. Quelques bonnes prises au début du match, yoo très rapide chez moi, awaji très rapide chez elle. Et j’ai profité de 2/3 de ses fautes à des moments qui lui ont fait mal ce qui m’a permis de prendre le match. Le terrain était d’ailleurs très spécial, je crois que je n’ai jamais vu autant de carte jumelle au début d’un match (cf photo). Le deuxième match, je joue contre Yukari-chan qui est donc D kyu, j’ai déjà perdu de 9 contre elle la semaine dernière, mais les deux matchs précédents j’avais gagné de 10 et de 6. Je pense qu’on a un niveau assez similaire et je suis plutôt content de jouer ce match.


Je ne sais pas si c’est parce que j’avais gagné le match juste avant contre une B kyû où s’il y a une autre raison, mais ma mémorisation n’est pas parfaite, je pense que j’ai 40 cartes très bien en tête 7/8 cartes un peu flou et 2/3 cartes oubliés. Cependant, même si ça arrive d’avoir ce genre de mémorisation au début d’un match, souvent ça se règle vite et ça ne pose pas de problème. Cependant, les cartes que j’avais mal mémorisées sont rapidement lues et très vite je suis menée de 3 cartes (24-21). Le rythme du match n’est vraiment pas en ma faveur, je commets une première faute au moment où je commençais à rentrer un peu dans le match. Après ça j’ai « imako » et « asaborakeu » qui sont lu en ma faveur chez elle alors qu’elle attaquait chez moi. Il faut noter que sur ces 2 cartes j’ai eu extrêmement chaud car Imako elle a touché les cartes avant moi, mais j’ai réussi à toucher juste « imako » avant qu’elle ne sorte du terrain. Je dois avouer que quand j’ai vu que « imako » était la seule carte restée sous mes doigts j’ai eu une petite satisfaction. Pour « asaborakeu » aussi, je l’ai pris vraiment avec un timing excellent, mais elle était déjà entrain de revenir à toute vitesse vers la carte. Après ces deux bonnes prises, je crois que je suis toujours en train de perdre « 21-17 ». J’enchaine avec une double faute sure « yonoyo/yonowa » bien après la syllabe déterminante et à partir de là c’est un snowball, elle ne fait presque aucune faute et moi je continue à en faire une de temps en temps. De plus Yukari-chan a toujours sa main qui part au milieu du terrain avant même d’avoir distinguer le premier son et elle écoute en se déplaçant, cela rend sa défense assez faible mais elle vise très bien le terrain de l’adversaire. Contre un joueur de ce type, perdre le début du match fait tout de suite très mal car défendre son terrain est compliqué et attaquer devient de plus en plus dur au fur et à mesure que notre nombre de carte diminue.


Quand le match se termine et que j’ai toujours 15 cartes en face de moi ça fait vraiment mal, j’ai certes fait 4 fautes, mais mon karuta n’était pas si horrible et j’ai quand même eu des bonnes prises. Je me demande vraiment ce qu’il s’est passé. Déjà il faut dire que Yukari-chan gagne régulièrement contre des C kyu et même des C kyu avec un bon niveau et que s’il y avait des tournois en ce moment elle serait surement déjà C kyu. Cependant, même après avoir penser cela, ça ne suffit pas à expliquer une défaite de 15 cartes. Je pense que ce qui m’a couté le plus cher dans ce match c’est de ne pas être capable de m’adapter au style de mon adversaire. J’ai déplacé des cartes au milieu alors que c’est exactement là où allé sa main va avant même d’avoir entendu quoi que ce soit et je me les suis donc fait sniper à toute vitesse. Je n’ai pas su ramasser certaines cartes chez elle où elle était clairement en retard et j’ai fait des doubles fautes au pire timing par manque de mémorisation et de concentration. Le nagare (flow) du match n’était vraiment pas en ma faveur, mais sans ces erreur le match aurait sans aucun doute été beaucoup plus serré et nettement plus intéressant. De cette défaite de 15 cartes je tire donc la leçon qu’il faut mieux observer ses adversaires et qu’on ne peut pas jouer de la même façon contre tout le monde.


Merci d’avoir lu, et à bientôt pour de nouveaux récits de matchs de karuta au Japon.


Gabriel




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