03/11/2013 – Romain
Si vous êtes ici, c’est que vous souhaitez comprendre plus en profondeur les Kimari-ji, ces mystérieuses syllabes déterminantes dont j’ai déjà parlé dans un précédent article.
Pour commencer, rendez-vous sur ce lien, et téléchargez le document. Vous y trouverez toutes les cartes avec comme nom (d’image) leur nom de carte, et pour certaines, seront indiquées entre parenthèses les syllabes qui suivent mais qui ne sont pas déterminantes. Un autre dossier, que je détaille plus bas, sera également présent.
Pour rappel, et afin que ce soit bien clair dans l’esprit de chacun : chaque poème est découpé en deux parties, seule la deuxième étant inscrite sur les cartes de jeu. L’objectif est donc d’être capable de reconnaître la 2e partie du poème (et sa carte) à partir de la première partie qui sera lue. Quand « Chihayaburu Kamiyomo kikazu Tatsutagawa » est lue (première partie du poème CHIHA), vous devez prendre la carte où est inscrit « Karakurenai ni mizu kukuru to wa » (2e partie de CHIHA). Mais le plus important sera de savoir à partir de quelle syllabe il est possible d’identifier le poème en train d’être lu.
Ainsi, un poème qui peut être reconnu à sa première syllabe implique forcément qu’aucun autre poème ne commencera par cette même syllabe. C’est pourquoi il n’existe qu’une carte commençant par « SU », « SA » ou encore « SE ». En revanche, un poème qui ne peut être reconnu qu’à partir de la 4e syllabe, comme « CHIGIRIKI », implique qu’au moins une autre carte commence par « Chigiri » (CHIGIRIO), et que d’autres commencent peut-être simplement par « Chi » (CHIHA). Connaître l’ensemble des syllabes déterminantes (donc en gros, le nom des 100 cartes) est la première étape à franchir, et la plus importante pour débuter. C’est ce qui vous permet de savoir quels sont les différents acteurs en jeu. Votre premier objectif sera donc simplement d’apprendre la liste des 100 cartes. Pas les poèmes en entier, juste les syllabes déterminantes. Voici la liste en question, classée selon le système MUSUMEFUSAHOSE (voir l’article sur la mémorisation pour plus de détails) :
*MU – SU – ME – FU – SA – HO – SE
*UKA/URA – TSUKU/TSUKI – SHIRA/SHINO – MOMO/MORO – YUU/YURA
*INI / IMAWA / IMAKO – CHIHA / CHIGIRIKI / CHIGIRIO – HISA / HITOWA / HITOMO – KIRI / KIMIGATAMEO / KIMIGATAMEHA
*HANASA / HANANO / HARUSU / HARUNO – YAE / YASU / YAMAZA / YAMAGA – YOWO / YOMO / YONONAKAWA / YONONAKAYO – KASA / KAKU / KAZEWO / KAZESO
*MISE / MIYO / MICHI / MIKANO / MIKAKI – TAGO / TAMA / TARE / TACHI / TAKA / TAKI – KOI / KORE / KONO / KONU / KOKOROA / KOKORONI
*OGU / OKU / OTO / OMO / OOE / OOKE / OOKO – WABI / WAGAI / WAGASO / WASURE / WASURA / WATANOHARAKO / WATANOHARAYA
*NATSU / NAGEKI / NAGEKE / NAGARA / NAGAKA / NANISHI / NANIWAE / NANIWAGA
*AI / AKE / ASHI / AMANO / AMATSU / AWARE / AWAJI / ARIA / ARIMA / ARAZA / ARASHI / AKINO / AKIKA / ASAJI / ASABORAKEA / ASABORAKEU
Peut-être vous demandez-vous pourquoi j’insiste autant sur l’importance d’apprendre les syllabes déterminantes (et accessoirement cette liste) lorsque l’on débute ? Pour procéder par analogie, prenons l’exemple de la géographie. N’importe quel Français aura plus de facilités à apprendre la carte de la France que la carte, disons, du Japon, pour une raison très simple : il connaît déjà le nom de tous les départements français, mais n’en connait probablement que très peu au Japon. Ainsi, il doit juste apprendre à placer ces noms sur la carte française, alors que sur la carte japonaise, il devra d’abord apprendre par cœur les noms des départements, et seulement ensuite pourra-t-il apprendre à les placer. Le Karuta fonctionne exactement de la même façon. Vous devrez mémoriser l’emplacement de 50 cartes, ce qui est déjà très difficile lorsque l’on débute. Mais si en plus de cela vous devez apprendre par cœur le nom des poèmes, alors vous n’aurez absolument aucun repère. Soyez donc conscient des cartes existant en Karuta, et vous verrez que vos premières parties s’en retrouveront considérablement simplifiées.
La principale difficulté du Karuta au début réside dans la deuxième étape : être capable de donner la syllabe déterminante d’un poème simplement en voyant la carte. Et une fois que ce sera fait, tout ce que vous aurez à retenir, c’est par exemple que « CHIHA » est dans votre coin droit. La deuxième partie du poème deviendra alors inexistante à vos yeux. Si cela vous paraît bien trop difficile et que vous paniquez déjà à l’idée de retenir tout ceci, rassurez-vous ! Il existe des cartes particulières qui vous permettent de jouer sans même connaître tout ceci ! J’en parlerai à la fin de cet article, donc surtout, n’abandonnez pas en cours de lecture parce que vous perdez espoir. Même si vous ne pouvez pas retenir le nom des cartes, vous pourrez tout de même jouer ! C’est d’ailleurs le cas de plus de la moitié de nos joueurs. Jouer sans ces cartes, c’est un peu comme avoir la ceinture noire en Karate : on fait la même chose, mais un niveau au-dessus.
Maintenant, comment apprendre ces syllabes déterminantes ? C’est là la question que vous devrez vous poser. Inutile de connaître le sens des poèmes, ça n’est qu’un moyen parmi d’autres de retenir les noms. J’ai fait sans pour la quasi-totalité des cartes.
Il existe globalement trois manières de mémoriser les cartes : utiliser des caractères sur la carte qui sont proches du nom, utiliser des caractères qui dénotent un peu et fonctionner par associations d’idées, ou apprendre par cœur. J’ai pour ma part appris par cœur environ 5 poèmes car je n’arrivais pas à retenir les noms autrement (ou parce que j’aimais bien les poèmes, tout simplement). Je dirais que pour une dizaine d’autres poèmes, j’ai dû faire sans moyens mnémotechniques, et simplement m’habituer à l’ensemble de la carte.
Quoi qu’il en soit, utilisons des exemples pour vous faire comprendre l’idée.
Cette carte s’appelle « yura ». Cela signifie donc que quand vous entendrez « yura », vous serez sûr à 100% que c’est de cette carte qu’il s’agit. Pour info, les caractères du poèmes se lisent ainsi (de haut en bas, puis de droite à gauche) : YU KU HE MO SHI RA NU KO HI NO MI CHI KA NA.
Maintenant, si je vous dis « trouvez un moyen de retenir que cette carte s’appelle YURA », vous y arriveriez? Si vous avez l’habitude d’user de divers moyens mnémotechniques, je suis sûr que oui. Mais si ce n’est pas le cas, pas de problème, ça viendra vite, et je vous donnerai des conseils pour vous aider.
Alors? Vous avez vu le « truc » ?
Là, vous le tenez. Si on regarde de droite à gauche, on voit les caractères « yu » et « ra » en hiragana. Le nom de la carte est donc présent de manière presque évidente. C’est idéalement de cette façon là que vous mémoriserez vos cartes. Là, je suppose que ça vous rassure, non? Pas besoin d’un niveau de fou en japonais pour réussir dans ces conditions.
Modérons toutefois nos propos. Certaines cartes ne sont pas aussi évidentes, et il arrive qu’aucun caractère du nom ne soit inclu sur la carte. Dans ces cas là, on usera de moyens mnémotechniques parfois assez détournés.
Prenons par exemple…
Tiens, « Yuu », la carte jumelle de « Yura » justement.
Les deux caractères entourés se lisent « Ashi ». Donc je suppose qu’en voyant ça, ça ne vous évoque absolument rien, n’est-ce pas? C’est normal. Il faut faire un peu de gymnastique intellectuelle. « Yuu », en japonais, c’est le début de « yuurei », le fantôme. Or, dans les contes japonais, les fantômes n’ont pas de jambes, et « ashi », les premiers caractères de la carte, signifie justement « jambes ». Bref, en voyant « ashi », vous penserez « pas de jambe » –> « fantôme » –> « YUU(rei) ».
Peut-être que vous trouverez une manière plus efficace à vos yeux de mémoriser cette carte, et dans ce cas, tant mieux ! Je n’ai écrit ici que dans le but de vous montrer un exemple, afin que vous ayez une idée de la façon dont on peut mémoriser les cartes.
Dans l’article suivant, je vous donnerai un maximum de conseils pour apprendre le plus facilement possible le nom des différentes cartes.
J’AI MÉMORISÉ, ET MAINTENANT?
Le but dans un premier temps est d’être capable de reconnaître de manière sure et certaine les cent cartes. Les reconnaître vite, ça viendra après. Mais quitte à y passer 20 secondes, vous devez avoir un moyen de dire « c’est bon, j’en suis sûr, cette carte c’est Yura parce que… (=les caractères YU et RA sont présents sur la carte) ».
Une fois que c’est fait, vous allez pouvoir commencer à vous entraîner afin de réduire ce temps. Au début, pour les 100 cartes, il n’y aura rien d’étonnant à ce que ça vous prenne 10 minutes, voire plus. Tout le monde commence ainsi. Mais en vous entraînant, vous arriverez vite à réduire de plusieurs minutes ce temps.
Pour commencer, ayez bien en tête les 100 cartes de Karuta. Si vous avez oublié que les cartes « yura » et « yuu » existent, vous aurez bien plus de mal à retrouver leur nom en voyant leur carte. Là, faites comme vous le sentez. Lisez autant de fois qu’il le faut les noms, faites vous des listes, répétez les, bref, tant que vous les retenez, c’est l’essentiel. Pensez également à les apprendre par associations, par exemple en prenant toutes les cartes commençant par « A », et au sein même de celles-ci, triez les par cartes jumelles, et dans l’ordre des plus courtes aux plus longues (donc par exemple : AI, ASHI, AKE, AKINO, AKIKA, AMATSU, AMANO, etc…). Faites également attention à leur nombre. Par exemple, savoir que 3 cartes commencent par « CHI » vous permettra, une fois que les 2 premières auront été lues, d’être sûr à 100% que la suivante pourra être prise directement sur « CHI » sans risque de faute.
Ceci fait, prenez vos 100 cartes, et faites les tourner en essayant de donner leur nom le plus vite possible. Le logiciel Kazemiso vous simplifiera ici significativement la tâche.
N’oubliez pas également d’apprendre à lire les cartes à l’envers. Ce sera utile pour quand vous devrez lire les cartes de l’adversaire.
Pour information, un 2e dan sera généralement capable de lire les 100 cartes en l’espace d’une minute (bien que certains n’y parviennent pas), mais on ne peut pas en attendre autant d’un étranger. En effet, le japonais étant habitué à ne lire que des hiragana, il aura une vision globale de tous les caractères inscrits sur la carte. En revanche, l’étranger doit se focaliser un peu plus sur les caractères, et aura du mal à voir sans regarder, si vous saisissez la nuance, qui a ici son importance. Malgré tout, aucun problème de ce côté ! Lire en une minute les 100 cartes, ça ne sert à rien ! On peut dire qu’à partir de 3 minutes pour les 100 cartes, vous pourrez jouer de manière normale, et qu’à partir de 2 minutes, vous ne ressentirez plus la moindre gêne.
Il sera très important pour vous de chronométrer ces essais ! En effet, cela vous donne un objectif clair et mesurable, et il n’y a rien de mieux pour maintenir sa motivation intacte (et je vous avoue à mes débuts avoir personnellement tiré une bonne partie de ma motivation de ce challenge)
J’AI DU MAL A MÉMORISER, MAIS J’AI VRAIMENT ENVIE DE JOUER, JE FAIS COMMENT?
Pas de soucis ! Les Japonais ont pensé à vous ! Enfin, à tous les débutants qui souhaitent pouvoir jouer rapidement.
Il existe en effet des cartes réservées aux débutants sur lesquelles sont directement inscrits en grosses lettres rouges les noms des poèmes : les kimari-fuda. Vous vous souvenez de cet épisode de Chihayafuru, au tout début, quand Arata dit à Chihaya que dorénavant, il voit en rouge son nom sur la carte « Chiha » ? Eh bien c’est une référence à cela justement.
Avec ces modèles là, pas besoin de s’embêter à mémoriser chacune des cartes de jeu. Il vous suffit de lire les lettres inscrites en rouge, et c’est bon, vous saurez à partir de quelle syllabe vous pourrez la prendre. Au Japon, on fait toujours jouer les débutants avec ces cartes durant quelques parties, car entrer dans le grand bain dès le début serait trop brusque. L’idée est de s’habituer aux mécaniques du jeu, s’habituer à mémoriser les 50 cartes sur les terrains, et quand enfin on se sent prêt, on peut alors faire le grand plongeon. Par conséquent, si vous-même avez envie de vous essayer un peu au Karuta, mais avez peur de ne pas être capable de tout retenir, ou souhaitez avant tout vous faire une idée des parties, il ne vous reste qu’à imprimer ces cartes et à jouer avec. Vous pourrez les trouver dans le document que j’ai joint plus haut !
Voilà, vous savez maintenant tout ce qu’il faut sur les syllabes déterminantes, et si vous avez suivi toutes les étapes jusqu’à maintenant (à savoir télécharger les documents que j’ai mis à votre disposition, apprendre les hiragana et les règles du karuta, puis mémoriser les cartes ou imprimer les cartes kimari-ji), vous serez même enfin capable de réaliser vos premières parties de Karuta ! Évidemment, il y a encore tout un tas de choses à savoir, comme comment placer ses cartes, comment les prendre, comment ne pas faire de fautes, quelles cartes envoyer à l’adversaire, mais chaque chose en son temps. Avant de faire le deuxième pas, commençons par terminer le premier !
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